Depuis une vingtaines d’années, les mobile-homes sont devenus la norme dans tous les campings de la côte Picarde. Pour les habitants de la région aux revenus modestes, c’est l’occasion d’accéder à la propriété à moindre coût, où de s’offrir une résidence secondaire pour la retraite.
Le camping Ami-Ami se situe entre les dunes et la plage du Terminus, au nord de Berck-sur-Mer.

Le camping Ami-Ami se situe entre les dunes et la plage du Terminus, au nord de Berck-sur-Mer.

Un mobile-home n’est pas si mobile, il faut un convoi exceptionnel pour le transporter.

Créé en 1974, Ami-Ami est un camping familial classé deux étoiles. Il s’étend sur deux hectares et compte environ 150 emplacements de mobile-homes.

Fabien et Véronique sont jeunes mariés. Ils ont acheté le mobile-home pour Luna et Praline, leurs deux petits yorkshires.

Danièle fait des promenades « poubelles » c’est à dire qu’elle prétexte d’aller aux vide-ordures pour discuter en chemin avec les campeurs.

Jean-Marie et Nicole sont bien placés dans le camping. Ils observent les allées et les venues des vacanciers.

Enfants, Marc et Stéphane passaient déjà leurs vacances dans ce camping. Pour leurs fils, ils ont adopté Zaza trouvée à la SPA. Elle pesait 1Kg et avait une patte dans le plâtre.

Durant des années, Éric sortait un clairon à l’heure de l’apéro, et les campeurs criaient en écho : À la votre ! Santé !

Le dimanche matin, Loulou fait son marché à Berck, puis il va à la messe.

Maïlys et Ilenzo sont en vacances chez leur grand-mère, elle est agent de nettoyage dans le camping. 

Martine habite la région, elle vient depuis une dizaine d’années d’un coup de voiture.
C’est calme, tranquille, propre et les gens sont gentils.

Jean-Paul a connu sa femme en colonie de vacances à Berck-sur-Mer. Depuis, ils viennent tous les étés. Ils aiment garder leur intimité, surtout Jean-Paul.​​​​​​​

Claude s’est installé il y a 30 ans. Sa fille « fricotait » dans son dos avec les garçons du bal. Elle a été élue Miss Camping car elle ressemblait à Brigitte Bardot.​​​​​​​

Jarod fait parti d’une fratrie de huit enfants. Ils vivent dans une petite maison d’ouvrier et viennent passer les week-ends au bord de la mer. Leurs parents ont investi dans une résidence secondaire.​​​​​​​

Maurice est le seul à vivre toute l’année dans sa maison sur plots. Aujourd’hui à la retraitre, il était l’homme à tout faire du camping : la plomberie, le jardinage, l’électricité, la construction du mini-golf, c’est lui.​​​​​​​

Francine vient au camping depuis 40 ans. Elle sort assez peu désormais, sauf quand une amie vient la chercher en voiture, pour un café à 200 mètres.​​​​​​​

Sarah et ses trois enfants, Rihanna, Élona et Sacha profitent de la « maison escacot ». Ce sont les grands-parents qui ont acheté ce pied-à-terre pour toute la famille.​​​​​​​

Josette et Georges ont fait installer des volets électriques pour la sécurité et pour garder le frais car l’été, c’est vite la fournaise. Il y a des volets d’origine mais ils ne sont que décoratifs.​​​​​​​

Comme ses voisins qui ont des animaux, Claudine a pris soin de poser des barrières.​​​​​​​

Claude s’installe dans sa résidence secondaire du 1er Mai au 31 Septembre. ​​​​​​​

Gilberte et Georges ont installé des barrières pour la "sécurité" mais elles n’ont pas de serrures et les chiens des voisins passent par dessus.​​​​​​​

Les vacanciers quittent le camping pour la fermeture saisonnière.​​​​​​​

Mimi jette un coup d’oeil aux naturistes gays qui squattent les dunes de l’autre coté du camping.​​​​​​​

PUBLICATION DANS L'OBS
Immobile Home

Le camping Ami-Ami a attiré mon attention : situé à Berck-sur-Mer derrière la plage dite du Terminus à l’extrémité nord de la ville, ce camping est resté dans son jus depuis 1974, date de son ouverture. Il est simple, sans arbre ni végétation, désuet à souhait, avec un bac à sable et un mini golf asséché pour seule animation, il est pourtant fréquenté de génération en génération depuis   plus de quarante ans. Le camping Ami-Ami c’est une histoire de famille, tout le monde se fait la bise, les couples se font et se défont, les vacanciers s’y donnent rendez-vous chaque été ou les week-end de beaux temps pour profiter du barbecue.

À regarder de plus près, le mobile-home est plus un bien de consommation de loisir qu’un placement immobilier : ce  type de  logement    décote rapidement car il est éphémère et vite vétuste. De plus, comme son nom ne l’indique pas, un mobile-home se déplace une seule fois et en convoi exceptionnel, pour être installé définitivement sur une parcelle. Celle-ci est payante toute l’année, comme un loyer, à remettre au gérant du camping qui n’en ouvre l’accès que pendant la période estivale. L’hiver, les propriétaires ne disposent donc pas de leurs maisonnettes. Mais qu’importe, aux beaux jours, les vacanciers transforment leur préfabriqué en vrai lieu de villégiature et cela pour plusieurs décennies. Ainsi, ils posent les photos sur la cheminée en stuc, installent de fausses boîtes aux lettres pour les oiseaux, suspendent des pots de fleurs avec leur système d’arrosage automatique.

Pourquoi peut-on vouloir tout lâcher pour les vacances, mais en emportant son chez soi sur son dos, comme un escargot ? Je voulais comprendre ce qui motivait les habitants de la région à vouloir investir leurs économies, sur une concession de loisir reproduisant trait pour trait, le fonctionnement d’une société à petite échelle : les mobile-homes sont rangés en rangs d’oignons, bordées de mini-barrières, recréant ainsi un mini-monde avec ses rues, ses bégonias et sa vie de voisinage et ce qu’elle induit, comme tension. Alors j’ai rencontré Francine qui vit l’été à deux pas de la plage avant de rentrer passer l’hiver dans son HLM ; Marc et Stéphane, qui se sont rencontrés enfants dans ce camping et souhaitent partager cet endroit avec leurs garçons ; Maurice, figure emblématique qui s’habille en gendarme et circule le soir avec un gyrophare pour amuser la compagnie.

Ami-Ami ce n’est pas Miami avec ses touristes en bikini et ses palmiers mais un lieu de repli, rassurant, modeste, où l’on retrouve ses voisins comme si c’était sa famille. Il faut y venir pour comprendre, sentir ces petits riens que les gens viennent chercher. C’est comme si Ami-Ami avait le pouvoir de garder les gens ici, pour toujours.
Stéphanie Lacombe
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